Abidate Abdourahamane, âgée de 28 ans, et mère de trois garçons a obtenu une licence en biologie à l’Université des Comores. Elle est la première femme comorienne à se lancer dans la production et l’utilisation de l’énergie renouvelable issue de la biomasse mais aussi la production d’engrais naturels liquides. Passionnée par l’environnement depuis son enfance, plus précisément la valorisation des déchets biodégradables, elle a installé des biodigesteurs sur les îles de Ngazidja et Mohéli.
Suite à un concours entrepreneurial organisé par OIA Groupe, une plateforme d’incubation des startups aux Comores, elle est sortie troisième lauréate, ce qui lui a permis de se lancer dans la réalisation de ses rêves. Ceux qui connaissent Abidate la regardent avec admiration et elle a été citée comme exemple dans le journal national pour sa ténacité :
« Abidate, mariée à 16 ans, a eu son premier enfant à 18 ans alors qu’elle était encore en classe de terminale. Elle a accouché et 15 jours après elle est revenue pour reprendre ses études et a eu son baccalauréat en 2011. C’est une histoire incroyable », confie Dhoifiroudine Ahamada.
Aujourd’hui, le courage et la détermination l’animent toujours : elle est la présidente de la société par coopérative simplifié SHAWIRI-scoops.
« Notre organisation est composée principalement de femmes : nous sommes quatre et les hommes engagés auprès de nous sont au nombre de deux. Ensemble, nous avons convaincu le programme de micro financement du PNUD de nous financer à hauteur de 50 000 USD pour mettre en place trois biodigesteurs à Mitsoudjé, Ouallah 2 et Banda Samlini. L’énergie par la biomasse est peu connue aux Comores et les usages sont pourtant nombreux : le biogaz pour la cuisson, l’électrification et le chauffage, l’engrais naturel liquide pour faciliter et renforcer l’agriculture durable par la collecte des déchets biodégradables », précise Abidate Abdourahamane.
Un succès mais des défis qui restent à relever
Pendant les campagnes de sensibilisation auprès des communautés, lors des rencontres avec les autorités locales, les notables et les leaders d’opinion, on remarque que certaines croyances populaires demeurent, qui ralentissement les initiatives d’Abidate et de son équipe en matière de consommation énergétique et d’utilisation des engrais chimiques dans le pays.
Pour changer la donne, notamment auprès des jeunes SHAWIRI-scoops désire organiser des formations sur le tri et la valorisation des déchets organiques dans les établissements scolaires et universitaires. « Lorsqu’on s’engage pour réduire la quantité de déchets produits, on doit se changer, au plus jeune âge, les comportements nocifs pour l’environnement, notamment les dépôts sauvages. Lors de nos interventions sur le terrain dans le nord et le centre de Ngazidja, on a rencontré plusieurs problèmes : on nous a soupçonné de vouloir fabriquer des bombes alors que nous cherchions simplement un terrain pour expérimenter l’utilisation des biodigesteurs. Certaines utilisations du biodigesteur avec des déchets organiques sont acceptées, d’autres sont taboues. Récemment on nous a aussi demandé de rémunérer la collecte de déchets biodégradables alors que nous rendons un service et que dans un autre contexte, c’est un service payant. Nous manquons aussi de broyeur à déchets, d’un camion pour faciliter le transport des déchets ».
Pour Abidate et son équipe, les défis restent nombreux et si le GEF et le PNUD ont cru en leur projet, des fonds additionnels manquent pour assurer la durée dans le temps et l’étendre dans le pays, avec comme objectif d’ancrer les pratiques de recyclage, l’usage des énergies renouvelables, les pratiques agricoles dans le quotidien du monde rural aux Comores.